LES GENES CANDIDATS
30 minutes pour tout comprendre du fonctionnement et de la recherche mondiale,
par Alexandre BELAYEW, professeur à l’université de MONS, à l’origine de la découverte de DUX4
Les gènes candidats FSHD
Les gènes en 4q35
– DUX4 : C’est un gène homéotique donc un gène de commande pour d’autres gènes.
Dans le schéma sur le détail D4Z4, on observe qu’il contient les deux premiers exons du gène DUX4, qui se compose de 7 exons.
L’exon 3 est inclus dans la partie PLam de la séquence 4qA.
Ces trois premiers exons permettent l’expression de plusieurs ARNm de DUX4. On observe deux ARNm longs, qui sont dénommés DUX4fl (fl pour full length, pleine longueur), et un DUX4 court nommé DUX4s (short). Les 4 autres exons s’étalent jusqu’à 6,5 kb après le dernier D4Z4. Ils correspondent à l’expression embryonnaire normale du gène..
*Un gène est composé d’exons et d’introns, la partie utile du gène est composée des exons qui sont traduits en ARNm (ARNmessager). Chaque exon est relié à l’autre par une opération qui s’appelle épissage. Parfois un gène peut donner des produits différents, avec des épissages dits alternatifs, c’est à dire que l’ARNm ne comporte qu’un nombre réduit d’exons (dont parfois un morceau d’exon) sur tous les exons que le gène comporte.
Le muscle sain (contrôle) produit de faibles quantités de DUX4 court.
Le muscle FSHD produit de faibles quantités d’un DUX4 ARNm codant pour la protéine DUX4 pleine longueur. Quelques patients FSH expriment les deux ARNm DUX4fl et DUX4s
DUX4 dans les testicules : L’expression de DUX4 ARNm et protéine est caractérisé à un niveau important dans ce tissu, cela suggère un rôle pour cette protéine au cours du développement. L’origine chromosomique de l’expression de ces DUX4 a été étudiée via les polymorphismes génétiques sur 7 personnes. Oh surprise ! DUX4 provient en quantités égales des 2 CHR 4 et des CHR10 qu’ils soient 4qA ou 4qB. Mieux encore, on observe que ces transcrits sont issus des chromosomes 4 et 10 avec les exons 1,2 et 3 mais aussi avec les exons 1,2, 6, 7. L’équipe a aussi identifié un transcrit comprenant les exons 1,2,4,5,6,7.
Travail sur IPS : Ce sont des cellules souches pluripotentes induites, c’est à dire des cellules d’un tissu auxquelles on a incorporé 4 gènes qui les reprogramment en cellules souches pluripotentes. Ici elles proviennent de fibroblastes de peau.
Cellules IPS de personnes saines : Un DUX4fl est caractérisé
Cellules IPS de personnes FSH : Un DUX4fl est caractérisé
On laisse ces cellules se différencier en un tissu, seules les cellules FSH continuent de produire un ARNm DUX4fl.
Travail sur ES : Ce sont des cellules souches embryonnaires provenant d’un embryon.
Dans celles-ci, on observe l’expression de DUX4fl, mais à un niveau bien inférieur aux IPS.
Les auteurs concluent que l’ensemble de ces résultats indiquent que DUX4 pleine longueur est normalement exprimé à des stades spécifiques du développement et qu’il est supprimé dans la plupart des tissus somatiques. La contraction de la zone répétitive D4Z4 produit une suppression moins efficace de l’ARNm DUX4 pleine longueur dans les cellules musculaires squelettiques.
Informations d’après : Facioscapulohumeral Dystrophy: Incomplete Suppression of a Retrotransposed Gene. PLoS Genet. 2010 October; 6(10): e1001181
– FRG2 situé à proximité de D4Z4 serait surexprimé dans la FSHD (et non exprimé dans la population contrôle), mais ce gène ne semble pas pour autant responsable puisque plusieurs familles FSH qui ont des grandes délétions proximales ont aussi perdu ce gène et développe une FSH tout à fait classiquement.
– TUBB4Q, sans avoir prouvé sa sur-expression est aussi éliminé dans le lien causal par ces familles qui présentent de grandes délétions.
– DUX4C, s’il semble être impliqué au côté de DUX4 pour un rôle dans le mécanisme d’atrophie/regénération musculaire, il n’a pas à priori un lien causal dans la genèse de la maladie car il a aussi été concerné par ces grandes délétions observées dans quelques familles
– FRG1, bien que décrit pour interférer dans l’épissage, et permis l’obtention d’un modèle animal murin qui, en surexprimant ce gène conduit à un phénoype dystrophique, il n’apparait pas pour autant être en lui-même le vecteur de la cascade génétique provoquant la FSHD.
– ALP son rôle avait été exclu
– ANT1, adénosine nucléotide translocator, gène codant pour la protéine située dans la membrane de la mitochondrie, elle permet la conversion de l’ADP en ATP. Elle fait le lien entre la production d’ATP à l’intérieur de la mitochondrie et la consommation d’ATP à l’extérieur de la mitochondrie. Cette protéine joue également un rôle dans le pore de transition de perméabilité de la mitochondrie impliqué dans l’apoptose.
– Les autres gènes du chromosome 4, situés en amont sont aussi susceptibles de participer au développement de la pathologie, néanmoins on suppose que des interactions directes peuvent exister avec d’autres chromosomes. On peut citer le gène FAT1 qui sous-exprimé dans une souris conduit lui aussi à un phénotype dystrophique accompagné de problèmes auditifs et oculaires, son étude n’a pas encore donné lieu à des publications confirmant son implication dans la FSHD. Une publication parue le 13 juin 2013 dans PLOS génétics rend compte précisément de la fonction de ce gène. Son implication dans la FSHD pourrait expliquer ce tableau clinique débutant affectant préférentiellement certains muscles. Il est sous la régulation du gène DUX4.
Gènes sur autres chromosomes
– PITX1, gène situé sur le chromosome 5 a été caractérisé comme concourant à la pathologie par son rôle atrophique commandé par l’action de DUX4.
A RETENIR
La notion de gène candidat, comme le seul gène responsable de l’initiation de la maladie paraît relever plus de la théorie pour la FSHD, qu’une réalité objective. Les faits semblent plutôt diriger vers une expression simultanée et désordonnée de plusieurs gènes avec un rôle d’importance inégale par une relaxation de la chromatine en 4q35.
DATES CLES
La recherche de la localisation de l’anomalie génétique, entamée à la fin des années 1980, a abouti, après beaucoup de travail, à une première caractérisation en 1991. L’anomalie est une délétion partielle hétérozygote de motifs de répétitions en 4q35, très proche de l’extrémité du chromosome 4. En 2003, il a été établi qu’une autre condition génétique devait être remplie dans le déterminisme de la maladie : la maladie ne se déclare qu’en présence d’une séquence génétique (appelée 4qA) située entre la partie répétitive et le télomère. En 2007, l’existence du gène DUX4 (contenu dans ce motif de répétition) est prouvée dans des cultures cellulaires de myoblastes FSHD. En 2010, l’explication génétique tombe : pour que ce gène DUX4 s’exprime, il utilise un exon contenu dans la séquence 4qA, apportant un codon stop et le signal polyA. En 2011, ce gène DUX4 paraît jouer un rôle majeur dans le mécanisme d’apparition de la pathologie. Des cultures cellulaires normales deviennent myopathiques lorsqu’on y surexprime DUX4, et inversement, des cultures primaires de myoblastes FSH cultivées avec des oligonucléotides anti-sens anti-DUX4 ne produisent plus la protéine DUX4 et conduisent à la formation de myotubes normaux. Fin 2012, une seconde anomalie génétique est identifiée sur le chromosome 18.